Compte-rendu de la réunion du 12 juin 1965

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OUVROIR DE
LITTERATURE
POTENTIELLE

Circulaire n° 62

COMPTE-RENDU DE LA REUNION DU 12 JUIN 1965

à Chaumusson chez P.
Braffort

PRÉSENTS : J. Bens,
F. Le Lionnais, R. Queneau, Mme Queval, J. Queval, N. Arnaud, Latis, Kazuo Watanabé, Mme Braffort, P. Braffort, A. Blavier, J. Duchateau.

EXCUSÉS : A.-M. Schmidt,
C. Berge, J. Bens.

ATTENDU : J. Lescure.

Madame
Braffort
apporte un superbe couscous. « Que boirez-vous », demande-t-elle.

R. QUENEAU : Avec le couscous de
l’Evian.

Rires.

Latis doit faire un cours d’histoire de
France à K. Watanabé.

La présidence se dispute entre Bens et Latis. Bens fait valoir qu’il est absent.

LATIS : La séance est ouverte, la parole
à Le Lionnais.

Le Lionnais présente Kazuo Watanabé, traducteur de Rabelais en japonais et explique comment il
(Le Lionnais) eut, il y a 50 ans,
l’intuition de l’OuLiPo en découvrant Rabelais.

P. BRAFFORT (à Watanabé) : Etes-vous
parent avec le physicien le professeur Watanabé ?

WATANABÉ : Non, mais je le
connais.

Puis Watanabé ayant demandé des
éclaircissements sur la nature de l’OuLiPo, Latis les lui fournit brièvement. Sur ce, il se donne la parole.

Annexe I. Latis.

F. LE LIONNAIS : Je serais assez
partisan d’une réduction du laxisme.

R. QUENEAU : Que pensent les intégristes
de votre réforme ?

LATIS : … Ferry, par exemple, qui l’est…

J. QUEVAL : … Catholique-Romain ?

LATIS : … Tout cela est en cours. Je n’ai
pas voulu assister à la totalité du concile afin d’être parmi vous, mais aussi pour que
les

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    choses se passent un peu en dehors de moi. Je ne peux me prononcer. Nous sommes dans la
    phase préparatoire. C’est pourquoi je vous demande des suggestions.

    J. BENS : Les comptes-rendus de la revue du Collège (portant sur les livres,
    revues, expositions) manifestant trop le point de vue de « l’individu », pas assez celui de
    la Pataphysique.

    LATIS : On pourrait supprimer ces
    comptes-rendus ?

    A. BLAVIER : Il y a les pays extérieurs
    qui ont besoin d’être tenus au courant.

    R. QUENEAU : Il n’existe plus de revue
    donc il faut informer.

    LATIS : Picon a tué le Mercure qui était une sous N.R.F.

    N. ARNAUD : La NRF. est toujours debout.

    R. QUENEAU : Pas pour longtemps.

    J. DUCHATEAU : Vous êtes optimiste.

    N. ARNAUD : La revue du Collège est la dernière
    revue.

    J. BENS : S’il n’en res…

    VOIX (impérative) : Non.

    J. BENS : Excusez-moi.

    LATIS : Vous l’êtes depuis le début.

    F. LE LIONNAIS : Messieurs, je vous en
    prie.

    LATIS (à Le Lionnais) : Vous avez la
    parole.

    F. LE LIONNAIS : Merci. Merci beaucoup.
    En ce qui concerne la revue du
    Collège
    , je propose que lors d’une prochaine réunion nous soumettions à Latis quelques propositions. Le problème est que
    nous sommes débordés.

    N. ARNAUD : Il ne faut pas se laisser
    déborder.

    R. QUENEAU : Incluons la Pataphysique dans notre débordement.

    P. BRAFFORT : J’ai oublié la salade.

    F. LE LIONNAIS : Le salaud.

    P. BRAFFORT : Une petite salade.

    QUEVAL prend la parole

    – Annexe 2 (+ Réforme de la ponctuation.)  

    (+ L’astérisque   )

    J. BENS : La condamnation de l’astérisque par Queval me semble un peu sommaire. Son utilisation
    pour établir des demi-chapitres me paraît tout à fait justifiée, par exemple.

    LATIS : A propos de l’utilisation de
    nouveaux signes de ponctuations, je signale que l’hébreu en possède 32 ; c’est-à-dire qu’il
    s’agit là d’une véritable ponctuation du souffle.

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      WATANABÉ : Mais à quoi ça sert tous
      ces signes ?

      N. ARNAUD : A préciser la pensée de
      l’auteur.

      WATANABÉ : Ah !…

      N. ARNAUD : Quels sont les signes de
      ponctuations en Japonais ?

      WATANABÉ : Les mêmes que les
      vôtres. Nous avons adopté le système français.

      F. LE LIONNAIS : Il serait intéressant
      d’utiliser le « système » Queval afin
      d’essayer de modifier le sens d’un poème uniquement en changeant la ponctuation.

      Le Président donne la parole successivement

      à BLAVIER —Annexe 3  

      à LE LIONNAIS—Annexe 4  

      à QUEVAL—Annexe 5  

      à DUCHATEAU—Annexe 6  

      R. QUENEAU : A propos du duel et de la
      main, je voudrais rappeler que dans Fantomas, lorsque le noir met sa main devant le canon du revolver celui-ci
      explose.

      J. BENS : Raciste.

      P. BRAFFORT : Ce qui m’intéresse dans ce
      travail, je l’avais déjà signalé, je crois, c’est qu’il me semble voir surgir les prémices
      d’une nouvelle forme de critique littéraire. Bien sûr, il serait nécessaire de pouvoir se
      faire aider par des machines, à « la main » toutes ces opérations sont très longues. Je
      crois que demain, la critique cela consistera à montrer que tel auteur a utilisé (naïvement
      ou non) tel type de contraintes d’une manière cohérente ou non.

      J. BENS : C’est ce que je voulais dire.
      Moins une critique au niveau des valeurs qu’à celui des matériaux.

      P. BRAFFORT : J’ai parlé de la
      collaboration des machines, je voudrais ajouter que seuls des hommes peuvent se livrer à
      l’analyse sémantique, comme le montre l’échec de la traduction automatique. Il faudrait
      que Duchateau nous donne des listes de
      contraintes et que lorsque nous lisons des romans nous établissions des fiches.

      J. QUEVAL : Je voudrais parler du livre
      de Dhotel « Les lumières de la
      Forêt ». C’est pédal.

      N. ARNAUD : Péquoi ?

      A. BLAVIER : Avoue.

      P. BRAFFORT : N’avouez jamais.

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        J. QUEVAL : Gogique. Il y a deux pages
        illustrées face à face, 1200 mots par chapitre, et le texte se poursuit recto, on saute les
        deux pages, verso.

        N. ARNAUD : J’allais le dire.

        A. BLAVIER : Ça nous intéresse.

        R. QUENEAU : Messieurs, la séance est
        levée, on peut rester assis.

        Latis ayant dû partir (en taxi spécial)
        pour le concile, les questions administratives ont été réglées au préalable :

        1. Remerciement à Mme
          Genestoux
          pour ses comptes-rendus et la nouvelle formule proposée par elle
          (compte-rendu réalisé d’une séance sur l’autre) ;
        2. cartes postales ;
        3. ré-invitation de Faure ;
        4. Prochain OuLiPo : Mardi 10 août. Lieu à fixer par F. Le Lionnais ;
        5. Déjeuner Duchamp.

        Le S.P.


        J.D.

        Texte

        OUVROIR DE
        LITTERATURE
        POTENTIELLE

        Circulaire n° 62

        COMPTE-RENDU DE LA REUNION DU 12 JUIN 1965

        à Chaumusson chez P.
        Braffort

        PRÉSENTS : J. Bens,
        F. Le Lionnais, R. Queneau, Mme Queval, J. Queval, N. Arnaud, Latis, Kazuo Watanabé, Mme Braffort, P. Braffort, A. Blavier, J. Duchateau.

        EXCUSÉS : A.-M. Schmidt,
        C. Berge, J. Bens.

        ATTENDU : J. Lescure.

        Madame
        Braffort
        apporte un superbe couscous. « Que boirez-vous », demande-t-elle.

        R. QUENEAU : Avec le couscous de
        l’Evian.

        Rires.

        Latis doit faire un cours d’histoire de
        France à K. Watanabé.

        La présidence se dispute entre Bens et Latis. Bens fait valoir qu’il est absent.

        LATIS : La séance est ouverte, la parole
        à Le Lionnais.

        Le Lionnais présente Kazuo Watanabé, traducteur de Rabelais en japonais et explique comment il
        (Le Lionnais) eut, il y a 50 ans,
        l’intuition de l’OuLiPo en découvrant Rabelais.

        P. BRAFFORT (à Watanabé) : Etes-vous
        parent avec le physicien le professeur Watanabé ?

        WATANABÉ : Non, mais je le
        connais.

        Puis Watanabé ayant demandé des
        éclaircissements sur la nature de l’OuLiPo, Latis les lui fournit brièvement. Sur ce, il se donne la parole.

        Annexe I. Latis.

        F. LE LIONNAIS : Je serais assez
        partisan d’une réduction du laxisme.

        R. QUENEAU : Que pensent les intégristes
        de votre réforme ?

        LATIS : … Ferry, par exemple, qui l’est…

        J. QUEVAL : … Catholique-Romain ?

        LATIS : … Tout cela est en cours. Je n’ai
        pas voulu assister à la totalité du concile afin d’être parmi vous, mais aussi pour que
        les

        choses se passent un peu en dehors de moi. Je ne peux me prononcer. Nous sommes dans la
        phase préparatoire. C’est pourquoi je vous demande des suggestions.

        J. BENS : Les comptes-rendus de la revue du Collège (portant sur les livres,
        revues, expositions) manifestant trop le point de vue de « l’individu », pas assez celui de
        la Pataphysique.

        LATIS : On pourrait supprimer ces
        comptes-rendus ?

        A. BLAVIER : Il y a les pays extérieurs
        qui ont besoin d’être tenus au courant.

        R. QUENEAU : Il n’existe plus de revue
        donc il faut informer.

        LATIS : Picon a tué le Mercure qui était une sous N.R.F.

        N. ARNAUD : La NRF. est toujours debout.

        R. QUENEAU : Pas pour longtemps.

        J. DUCHATEAU : Vous êtes optimiste.

        N. ARNAUD : La revue du Collège est la dernière
        revue.

        J. BENS : S’il n’en res…

        VOIX (impérative) : Non.

        J. BENS : Excusez-moi.

        LATIS : Vous l’êtes depuis le début.

        F. LE LIONNAIS : Messieurs, je vous en
        prie.

        LATIS (à Le Lionnais) : Vous avez la
        parole.

        F. LE LIONNAIS : Merci. Merci beaucoup.
        En ce qui concerne la revue du
        Collège
        , je propose que lors d’une prochaine réunion nous soumettions à Latis quelques propositions. Le problème est que
        nous sommes débordés.

        N. ARNAUD : Il ne faut pas se laisser
        déborder.

        R. QUENEAU : Incluons la Pataphysique dans notre débordement.

        P. BRAFFORT : J’ai oublié la salade.

        F. LE LIONNAIS : Le salaud.

        P. BRAFFORT : Une petite salade.

        QUEVAL prend la parole

        – Annexe 2 (+ Réforme de la ponctuation.)  

        (+ L’astérisque   )

        J. BENS : La condamnation de l’astérisque par Queval me semble un peu sommaire. Son utilisation
        pour établir des demi-chapitres me paraît tout à fait justifiée, par exemple.

        LATIS : A propos de l’utilisation de
        nouveaux signes de ponctuations, je signale que l’hébreu en possède 32 ; c’est-à-dire qu’il
        s’agit là d’une véritable ponctuation du souffle.

        WATANABÉ : Mais à quoi ça sert tous
        ces signes ?

        N. ARNAUD : A préciser la pensée de
        l’auteur.

        WATANABÉ : Ah !…

        N. ARNAUD : Quels sont les signes de
        ponctuations en Japonais ?

        WATANABÉ : Les mêmes que les
        vôtres. Nous avons adopté le système français.

        F. LE LIONNAIS : Il serait intéressant
        d’utiliser le « système » Queval afin
        d’essayer de modifier le sens d’un poème uniquement en changeant la ponctuation.

        Le Président donne la parole successivement

        à BLAVIER —Annexe 3  

        à LE LIONNAIS—Annexe 4  

        à QUEVAL—Annexe 5  

        à DUCHATEAU—Annexe 6  

        R. QUENEAU : A propos du duel et de la
        main, je voudrais rappeler que dans Fantomas, lorsque le noir met sa main devant le canon du revolver celui-ci
        explose.

        J. BENS : Raciste.

        P. BRAFFORT : Ce qui m’intéresse dans ce
        travail, je l’avais déjà signalé, je crois, c’est qu’il me semble voir surgir les prémices
        d’une nouvelle forme de critique littéraire. Bien sûr, il serait nécessaire de pouvoir se
        faire aider par des machines, à « la main » toutes ces opérations sont très longues. Je
        crois que demain, la critique cela consistera à montrer que tel auteur a utilisé (naïvement
        ou non) tel type de contraintes d’une manière cohérente ou non.

        J. BENS : C’est ce que je voulais dire.
        Moins une critique au niveau des valeurs qu’à celui des matériaux.

        P. BRAFFORT : J’ai parlé de la
        collaboration des machines, je voudrais ajouter que seuls des hommes peuvent se livrer à
        l’analyse sémantique, comme le montre l’échec de la traduction automatique. Il faudrait
        que Duchateau nous donne des listes de
        contraintes et que lorsque nous lisons des romans nous établissions des fiches.

        J. QUEVAL : Je voudrais parler du livre
        de Dhotel « Les lumières de la
        Forêt ». C’est pédal.

        N. ARNAUD : Péquoi ?

        A. BLAVIER : Avoue.

        P. BRAFFORT : N’avouez jamais.

        J. QUEVAL : Gogique. Il y a deux pages
        illustrées face à face, 1200 mots par chapitre, et le texte se poursuit recto, on saute les
        deux pages, verso.

        N. ARNAUD : J’allais le dire.

        A. BLAVIER : Ça nous intéresse.

        R. QUENEAU : Messieurs, la séance est
        levée, on peut rester assis.

        Latis ayant dû partir (en taxi spécial)
        pour le concile, les questions administratives ont été réglées au préalable :

        1. Remerciement à Mme
          Genestoux
          pour ses comptes-rendus et la nouvelle formule proposée par elle
          (compte-rendu réalisé d’une séance sur l’autre) ;
        2. cartes postales ;
        3. ré-invitation de Faure ;
        4. Prochain OuLiPo : Mardi 10 août. Lieu à fixer par F. Le Lionnais ;
        5. Déjeuner Duchamp.

        Le S.P.


        J.D.

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